lundi 22 octobre 2007

Frugalité de l'homme, oxymore pas à jamais

FRUGALITÉ.

Ce mot, je l'ai récemment retrouvé dans le récit d'un pélerinage.

Ce mot, je l'ai trouvé et il m'a une première fois frappé comme la seule issue à notre impasse il y a 17 ans chez Castoriadis, dans Les carrefours du Labyrinthe, III, Le Monde morcelé (1990, Seuil, p. 320).

Voici le texte, chaque mot est un diamant. Il vaut se pesant d'or. Il ne pèse rien pourtant:
"La prospérité a été achetée depuis 1945 (et déjà avant, certes) au prix d'une destruction irréversible de l'en­vironnement. La fameuse « économie » moderne est en réalité un fantastique gaspillage d'un capital accumulé par la biosphère au cours de trois milliards d'années, gaspillage qui s'accélère exponentiellement tous les jours. Si l'on veut étendre au reste de la pla­nète (ses quatre cinquièmes, du point de vue de la population) le régime d'oligarchie libérale, il faudrait aussi ,lui fournir le niveau économique, sinon de la France, disons du Portugal. Vous voyez le cauchemar écologique que cela signifie, la destruction de res­sources non renouvelables, la multiplication par cinq ou par dix des émissions annuelles de polluants, l'accélération du réchauffe­ment de la planète? En réalité, c'est vers un tel état que nous allons, et le totalitarisme qui nous pend au nez n'est pas celui qui surgirait d'une révolution, c'est celui d'un gouvernement (peut-être mondial) qui, après une catastrophe écologique, dirait : vous vous êtes assez amusés, la fête est finie, voici vos deux litres d'essence et vos dix litres d'air pur pour le mois de décembre, et ceux qui pro­testent mettent en danger la survie de l'humanité et sont des enne­mis publics. Il y a là une limite externe sur laquelle le déchainements actuel de la technique et de l'économie va se cogner tôt ou tard. La sortie de la misère des pays pauvres ne pourrait se faire sans catastrophe que si l'humanité riche accepte une gestion de bon père de famille des ressources de la planète, un contrôle radi­cal de la technologie et de la production, une vie frugale. Cela peut être fait, dans l'arbitraire et l'irrationalité, par un régime autoritaire ou totalitaire ; cela peut être fait aussi par une humanité organisée démocratiquement, à condition précisément qu’elle abandonne les valeurs économiques et qu’elle investisse dans d’autres significations."

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